ALICE BLEYS
Fable des cartes à jouer
Rachel, Dame de carreau fortunée, alla se confier à Lahire, son aimable valet de coeur.
Rachel -Ô comme je me sens seule, mon valet, et ce depuis le fond des âges, le trône m’a valu la mort de mon entourage. Je ne puis aimer qui mon coeur désirerait, et le peuple ne sait que me détester.
Lahire -Chère Reine, comment vous plaindre de votre condition, vous qui me parlez le ventre joyeusement rempli de jambon ? À quoi bon avoir une famille, si de l’aîné à la cadette, je ne puis jamais remplir leurs assiettes ?
Rachel -Vous m’en voyez fort offusquée, l’argent peut bien s’acquérir, mais sans amour, je me sens mourir.
Lahire -Madame, imaginez-vous la douleur, de voir plonger dans la misère, un être que vous aimez de toute chair.
Rachel -Encore faudrait-il avoir un être à aimer, pourriez-vous sur ce point me contrer ?
Lahire -Je ne le pourrais point, mais je pourrais apprendre à vous aimer, si contre cela quelques pièces vous m’offrez.
Rachel -Si jamais vous ne vous lassez de moi, je pourrais assurer tous vos repas, désormais : aimez-moi.


La panse remplie d’amour
et le coeur rempli de joyaux
Fable première
La leçon du trèfle à quatre feuilles
Fable seconde

David, roi de pique, fit appeler à la cour Lancelot, as de trèfle.
David -Cher Lancelot, j’ai entendu de contrées non loin de là, que les trèfles fleurissaient sous vos pas.
Lancelot -Oh oui, je suis bien chanceux, mais jamais l’on ne me croît, tenez ce gibier de la forêt royale, il est apparu devant moi, et l’on m’a arrêté pour offense au roi.
David -Ne l’avez-vous donc pas tué ? Je ne puis entendre cela, que justice soit faite, au cachot on vous conduira.
Lancelot -Vous avez le pouvoir, mais avez-vous déjà eu la chance ? Vous ignorez cette joie, vous qui n’avez aucune carence
David -La chance décide pour vous, elle choisit quand c’est à vous d’être heureux, moi je décide de tout, je possède les dés du jeu.
Lancelot -C’est avec tout ce pouvoir que jamais vous ne connaîtrez, le bonheur fluctuant, la richesse de l’instabilité
David -Vous prônez le hasard, car sur rien d’autre vous ne pourriez compter. Pourquoi attendre la chance quand on peut tout contrôler ?
Lancelot -Je ne puis vous entendre, je préfère m’en aller, retrouver mon ignorance et les trèfles de mon pré.
